Yves ABATE, toujours très proche de ses animaux, nous livre une réflexion susceptible d’intéresser nombre de lecteurs. Jusqu’où peut-on aller trop loin ? A chacun de réagir.
J’écris cet article après avoir acheté un magnifique trio de poules naines Hollandaises huppées à la Ferme de Beaumont, de très bonne qualité et en pleine santé.
Cette année, toutes mes poules naines sont mortes sans que j’en connaisse la cause. Peut-être un ami de notre Covid 19 ou une autre saleté ! C’est pour cela que j’en ai racheté.
Pour nous, éleveurs amateurs, la réussite dépend avant tout du bien-être de nos pensionnaires.
Tout être vivant aspire à du bien-être pour s’épanouir durant son passage sur terre.
Hélas, il n’y en a pas beaucoup qui ont la chance de connaître cela. Quand je vois l’humanité, avec ses 7 milliards d’hommes, avec ses peuples soumis par des tyrans, ses peuples mis dans des camps de réfugiés, ses peuples qui manquent d’eau, de nourriture, d’espoir, je me trouve bien privilégié.
Pour les « bien-pensants », la mode est actuellement la lutte pour le bien-être animal. Je le vois pendant nos expositions, lorsque des gens bien intentionnés mais ne connaissant rien ni aux animaux ni à l’élevage s’offusquent devant mon gros canard en cage et pensent qu’il a une vie d’esclave cloîtré alors que, le lundi matin, il retrouve son amour de cane et son environnement paradisiaque dans le paysage verdoyant de mon étang.
Bien sûr que ce n’est pas le cas des élevages industriels, mais je ne crache pas non plus sur un bon magret grillé de canard dans mon assiette ! Il y a toujours des excès pour lesquels il faut s’opposer, mais ne tombons pas dans les extrêmes.
Pour vivre le bien-être, il faut se sentir bien dans son corps, dans sa tête et dans son milieu environnemental. Les religions, avec la foi, permettent parfois d’atteindre ce bonheur.
Pour en revenir à mon trio d’Hollandaises huppées, lorsque je les ai lâchées dans le parc que je leur avais aménagé, j’ai été surpris de constater qu’elles n’avaient aucun instinct sauvage. Elles restaient toutes trois ensemble à manger leurs graines sans s’occuper de leur environnement. En les prenant dans la main, je me suis aperçu que leur magnifique huppe blanche retombait sur leurs yeux et leur vision se limitait au-dessous de leur bec. Cela m’a rappelé l’horreur que j’avais eue, étant enfant, quand j’avais vu un autre enfant se vanter d’avoir apprivoisé un merle qu’il tenait sur son doigt, alors qu’il lui avait crevé les deux yeux. C’est depuis ce moment que je sais que l’homme peut être insensible et capable de toutes les atrocités.
J’ai tout de suite pris des ciseaux et coupé toutes les plumes qui gênaient leur vison et elles ont retrouvé un comportement normal. Depuis le coq n’arrête plus de chanter.
Non, on peut se faire plaisir, mais il ne faut pas que cela influe sur le bien-être d’autrui.
En tant qu’éleveur, je pense qu’il est bien d’améliorer le type des animaux que l’on utilise, pour son plaisir ou pour se nourrir, mais il ne faut pas en faire des monstres qui souffrent de handicaps toute leur vie et n’ont plus de bien-être.
Restons vigilants, sensibles et responsables.
Yves ABATE